Jours 113 à 118 : Retour en selle dans le Guangxi, balade entre les pics de la rivière Li

Nous voici parvenus à la dernière étape de notre périple en sac à dos à travers la Chine, puisque nous rejoignons nos vélos à Guilin, afin de repartir sur les routes, en direction de Nanning puis du Vietnam.

Jour 113, Dimanche 4 novembre: Voyage vers Guilin, capitale de la région du Ghanxi

En ce dimanche, nous voilà à nouveau dans le TGV en direction de Guilin, dernière étape de notre balade en Chine, où nous attendent – en principe – sagement nos vélos.

Guilin, dans la Chine du Sud. Source de la carte : circuitchine.com

Un voyage de sept heures en train chinois, ça peut être un peu … Long. Il faut dire qu’en Chine, le niveau sonore acceptable dans un train est bien plus élevé qu’en France. Les gens parlent naturellement fort, sans doute pour se faire entendre dans le brouhaha permanent, il n’est pas attendu de celui qui écoute de la musique ou un film qu’il mette des écouteurs, et les bambins donnent libre court à la puissance de leurs cordes vocales sans restriction aucune.

Les enfants sont souvent sous la garde de leurs grands-parents, qui s’occupent d’eux alors que les parents sont au travail. Comme nous l’a expliqué Alessia, une sympathique expatriée italienne rencontrée au Mont Emeï, quand un couple se marie, les parents de l’époux s’installent avec eux pour s’occuper de l’enfant à naître. Ils le font avec un bonheur d’autant plus grand qu’ils n’ont eux-mêmes pas eu le temps d’élever leurs enfants, ayant délégué l’occupation à leurs propres parents. C’est pourquoi on voit très souvent, à la ville comme à la campagne, des petits enfants accompagnés d’adultes aux cheveux blancs, qui jouent avec eux ou les portent dans leur dos, dans des relations souvent adorables et chargées de tendresse. Et c’est pourquoi également, à l’époque de la politique de l’enfant unique, il valait mieux avoir un garçon, chez lequel on allait vivre quand on devenait trop vieux pour travailler.

Les petits enfants sont donc une source d’émerveillement intarissable pour les grands-parents, ce qui a aussi ses mauvais côtés dans le train chinois. Ainsi, à quelques sièges de nous, la crise d’un bambin est-elle couvée d’un regard admiratif par ses aïeux. D’autres grands-parents voyageant à côté viennent même féliciter bruyamment leurs voisins pour la vivacité du rejeton, qui n’en finit pas de faire des bêtises. Derrière nous, un autre enfant, sans doute désireux de ne pas demeurer en reste, se met à entonner, sous le regard attendri de papi, une chansonnette tout en rots. Nous avons déjà les oreilles qui saignent un peu mais c’est sans compter sans un jeune homme qui décide de jouer sur son téléphone à un jeu vidéo idiot le son à fond.

Oui, le trajet en train Chengdu/Guilin, c’est long, surtout vers la fin. Nous débarquons dans une gare un peu excentrée du centre-ville, sans savoir si c’est bien là que nous aurions dû descendre et découvrons qu’il nous faut faire une quinzaine de kilomètres pour atteindre notre auberge de jeunesse. Un coup de fil passé à la réceptionniste de l’auberge nous apprend qu’il n’y a pas de bus et nous enjoint à prendre un taxi. Mais évidemment, ceux-ci, qui se ruent sur nous, nous proposent des tarifs bien élevés !

Et surtout, nous, on se dit que c’est quand même un peu bizarre, une gare qui ne soit pas desservie par les transports publics. Considérant que la réceptionniste a sans doute voulu nous dire qu’il n’y a pas de bus direct, nous allons nous renseigner au point d’information touristique à côté de la gare. Il n’y a personne au guichet mais une femme en uniforme confirme qu’il n’y a pas de bus, tandis qu’un type sorti de nulle part fait mine de nous aider, puis nous propose, grand seigneur, de nous amener dans sa voiture personnelle pour la modique somme de 200 yuans (alors que la réceptionniste de notre hôtel nous indiquait que la course coûte environ 80 yuans). Alors que nous refusons, mais qu’il insiste sur le fait qu’en absence de bus, nous n’avons pas le choix, nous voyons passer un bus de ville juste derrière lui. « Ah bon, il n’y a pas de bus, et ça, c’est quoi, une poule d’eau ? » Bien fâchés d’avoir passé une demi-heure à galérer devant la gare, et résistant à l’envie de faire des doigts d’honneurs à notre presque arnaqueur, nous montons dans le bus direction le centre-ville. Nous descendons à quelques centaines de mètres de l’hôtel, pour découvrir le centre-ville de Guilin. Bon, heureusement que ce n’est pas pour ça qu’on est là, parce que c’est une enfilade d’allées commerçantes moches et bondées, cependant l’auberge de jeunesse, située au dernier étage d’un immeuble est plutôt sympa. Elle mise tout sur une magnifique et immense terrasse sur le toit mais pour notre part, tout ce qui nous intéresse, c’est de voir nos vélos. Et miracle, ils sont là, tout beaux, tout emballés, avec toutes leurs sacoches dans des cartons ! Ouf!

Youppi ! Demain, nous les briquerons, et ensuite, c’est parti pour deux semaines de vélo jusqu’à la frontière vietnamienne !

Jour 114, lundi 5 novembre : brico-vélo et découverte de Guilin

Aujourd’hui, on envahit le « rooftop » de notre auberge, en déballant nos cartons de sacoches comme si c’était Noël, et en donnant une nouvelle jeunesse à nos vélos. Et pour être honnête, c’est surtout Victor qui met les mains dans le cambouis tandis que je rattrape notre retard de publications sur le blog.

Après avoir constaté que les transporteurs chinois ont traité nos vélos avec le plus grand soin malgré leur long trajet en plusieurs trains, nous allons un peu nous balader en ville. Guilin, plutôt touristique, a des petits airs de station balnéaire au mois d’août. Des pagodes surplombent un lac artificiel attenant à la rivière Li mais les multiples lumières qui ont été apposées dessus ainsi que sur des structures flottantes aux design enfantins, donnent à l’ensemble un aspect Disney Land très prononcé. Nous faisons l’impasse sur les attractions touristiques de la ville, essentiellement la visite des parcs et des pics qui sont payantes, chères, et apparemment très propices aux arnaques en tous genres. Nous aurons bien le temps de voir des pics plus tard ! Nous nous arrêtons seulement dans un magasin d’électronique dans un passage souterrain, pour racheter un powerbank (batterie externe pour recharger nos appareils électroniques lors des bivouacs), puisque nous avons perdu le nôtre en Mongolie et que celui gentiment donné par Nick, un ami américain, ne marche pas bien. Nous le négocions sans le vouloir à bas prix car nous nous apercevons au moment de conclure la vente que nous n’avons pas pensé à retirer de l’argent et qu’il manque quelques yuans à la somme requise. Plutôt que de voir filer des clients, le vendeur préfère nous vendre le powerbank au rabais, mais il se met à bouder ferme et ne répond pas à nos au-revoir.

Nous terminons la soirée en nous baladant dans la « vieille ville » de Guilin, deux trois rues toutes retapées, qui fourmillent des boutiques, restaurants et cafés. Demain, c’est le grand départ pour Xinping, au bord de la rivière Li, et de ses beaux paysages de pics karstiques.

Jour 115, mardi 6 novembre, 72km, 580m de dénivelé : Reprise du vélo de Guilin à Xinping, vers les pics de la rivière Li

Et c’est que ce n’est pas si évident que ça, de reprendre le vélo après une pause d’un mois. Notre rythme de vie de backpackers et surtout un mois de nourriture chinoise ont eu pour effet de nous ramollir ! Je peux à peine rentrer dans mon cycliste de vélo, et dès que nous pédalons sur nos biclous, nous les trouvons étrangement lourds et instables. Il nous faut tout le temps de la sortie de Guilin, soit une dizaine de kilomètres, pour retrouver notre équilibre.

Et hop, c’est le grand départ!
Sortons déjà de l’immeuble, pour commencer

Il est déjà tard dans la matinée quand nous sortons enfin de la ville, et que nous trouvons quelque chose d’incroyable, que nous n’avions pas vu depuis bien longtemps : une piste cyclable ! Et une vraie, comme en Allemagne, qui ne se contente pas de longer la route mais qui passe le long de la rivière et est préservée du trafic routier. Bon, il lui arrive bien de s’arrêter brusquement sans explications, mais dans l’ensemble, la balade est très agréable, et la route principale peu fréquentée.

Nous suivons pendant quelques temps une voie de chemin de fer désaffectée et reconvertie en potagers puis, ce paisible chemin étant interrompu par la construction intempestive d’une maison, nous faisons un tour dans le bourg de Daxu, pour trouver un coin où manger. Dans une petite gargotte, nous découvrons le fameux plat de nouilles de riz de Guilin : des pates blanches en bouillon, accompagnées de quelques morceaux de viande panée, de feuilles de choux et de cacahuettes. On peut choisir d’y rajouter de l’eau bouillante, de la sauce soja, ou quelques petits accompagnements disponibles en libre-service dans des bols : oignons frais ciselés, piment frais, ou encore des petits légumes ou racines non identifiés marinés et pimentés. C’est plutôt très bon, et relativement bon marché : 5 yuans le bol, ce qui fait environ 60 centimes d’euros. Nous avons de plus la sensation que ce plat de pâtes de riz nous introduit à la cuisine vietnamienne et ses célèbres pho (du moins de ce que nous en connaissons en France).

Nous reprenons notre route et retrouvons la piste cyclable qui nous emmène derechef le long de la rivière Li. Le paysage commence à être intéressant, mais pas encore impressionnant, et nous voyons nos premières barques en bambous. Tout est assez calme, des gens sont occupés à pêcher des escargots, un plat réputé dans le coin, et il n’y a pour tout touristes que nous deux.

Nous suivons la rivière tant que nous le pouvons, puis il nous faut l’abandonner au profit de petites montagnes où quelques 500 mètres de dénivelé nous attendent. Et la route se met immédiatement à monter sérieusement, réveillant nos muscles trop longtemps endormis. Cependant, plus nous grimpons et plus les pics devient impressionnants, malgré une brume imposante qui obstrue le paysage et raccourcit notre horizon.

Nos efforts sont donc largement récompensés, et nos cuisses ramollies reprennent du poil de la bête, même si une douleur trop habituelle commence à poindre dans mon genoux droit. Alors que le col est enfin passé et que la route commence à redescendre, nous nous arrêtons à un point de vue pour observer les alentours, ces fameux pics karstiques recouverts d’une abondante végétation et qui poussent tout droit vers le ciel, comme si un géant, sous le sol, avait planté ses doigts à la verticale pour percer la croute terrestre.

Nous en profitons pour acheter de curieuses tomates oranges : les kakis. La petite vendeuse me donne le prix puis en empile une dizaine sur sa balance. Je l’arrête et lui montre mon vélo « vous êtes bien gentille, mais je ne peux pas transporter tout ça moi, et puis j’ai pas follement envie de me charger avant les montées ». Elle fait signe qu’elle comprend et réduit le nombre des kakis : c’est que nous avons rudement progressé en langage des signes avec Victor, à défaut de progresser en chinois. Alors que nous partons, la même petite dame me rajoute des kakis en cadeaux… Bon finalement, nous ne sommes peut-être pas aussi doués que nous le pensons pour la communication. Plus loin, nous faisons une pause goûter aux madeleines et kakis. C’est bon ces gros fruits orange, et c’est amusant, car dans le coin, tous les fruits sur leurs arbres sont orangés : kakis, mais aussi oranges, clémentines, et des minuscules clémentines de la taille d’un grain de raison dont nous ignorons le nom (NDLR: il est probable que ce soit des kumquats, merci pour l’information Carole!)

Il nous faut cependant vite repartir, car le soir commence à tomber, et il nous reste de la route jusqu’à notre étape du soir, Xinping, où nous avons repéré une auberge de jeunesse dans laquelle dormir. Heureusement, avec tout ce que nous avons monté, il ne nous reste plus qu’à descendre, puis à pédaler sur du plat. Alors que nous filons en nous émerveillant d’un paysage de plus en plus joli, le soleil se couche et la brume nimbe les pics d’un voile presque intimidant. Malgré nos rapides coups de pédale, nous arrivons de nuit à Xinping, petite bourgade à l’air tranquille, alternative à la ville très touristique de Yangshuo. Pour une reprise, c’était une bonne reprise, avec quelques 70 kilomètres en une grosse demi-journée.

Jour 116, mercredi 7novembre: journée récupération et tourisme à Xinping

Le lendemain, malheureusement, Victor se réveille malade, après une nuit fiévreuse. Constatant de son état, mais aussi du temps couvert de la matinée, nous décidons de rester à Xinping une journée supplémentaire, pour attendre tout autant le retour de la santé de Victor que celui du beau temps. C’est donc seule que je sors faire quelques emplettes dans la ville, que je découvre bien plus touristique que ce qu’une arrivée tardive la veille nous avait laissé à penser. Des cars de touristes chinois s’accumulent sur un petit parking, des boutiques de souvenirs alignent les mêmes produits que dans d’autres villes touristiques comme Pingyao, pourtant située à presque 2000km de là, et une habitation sur deux abrite un restaurant. Si Xinping est une alternative « tranquille » et « peu touristique » à Yangshuo, comme nous l’avons lu, ça ne donne pas envie d’aller à Yangshuo !

A la faveur d’une accalmie dans la fièvre de Victor, et grâce à un traitement de cheval, nous sortons pour aller voir l’attraction majeure de Xinping : le point de vue sur les pics qui a inspiré le dessin du billet de vingt yuans. Nous passons par une jetée, où un nombre incalculable de bateaux en bambous mais aussi de petits ferrys embarquent des touristes en gilet de sauvetage, et y goutons une spécialité locale : des brochettes de poisson frit. C’est plutôt bon, ça me rappelle la friture de poisson que ma grand-mère faisait avec le produit de notre pêche dans un ruisseau du Limousin.

Nous repoussons ensuite toutes les offres des taxis, scooters et touk-touk pour nous amener au point de vue et marchons courageusement 600 mètres. Et sous nos yeux, voilà les pics du billet de 20 yuans, un coin, il est vrai, très joli.

Et sur l’eau, c’est l’embouteillage des bateaux
Dans le coin les scooters et motos sont souvent équipés de protections : pour se prémunir du soleil ou de la pluie?

La grande mode ici, c’est de faire LA photo de soi avec un billet de 20 yuans, pour prouver au monde que la banque chinoise ne s’est pas trompée dans sa reproduction des pics, et qu’on en a été témoins. Inspirés par les pauses chinoises, nous nous prêtons à l’exercice même si nous n’avons pas le fameux billet.

« Non mais en fait ça marche pas avec le billet de 1 yuan, là c’est la tête de Mao » « Justement, tu ne reconnais pas l’arête du nez et le dessin des joues? »

Jour 117, jeudi 8 novembre, 30 km, 88m de dénivelé: petite balade à vélo le long de la rivière et des rizières

Aujourd’hui Victor va mieux et le soleil est de retour. Nous voilà donc partis pour une petite balade le long de la rivière Li, et de ses affluents les rivières Kouët et Oreï Yé (hihi), pour une reprise vélo un peu plus douce que l’avant-veille.

C’est quand même plus riant sous le soleil!

Avant cela, nous grimpons un des pics à côté de notre hôtel, pour accéder à son point d’observation. Et nous voilà repartis pour grimper des volées de marches, mais après les 30 000 marches du Mont Emeï, ce n’est pas une petite demi-heure de montée qui va nous faire peur. Ce n’est pas le cas d’autres touristes chinois, que nous voyons abandonner à mi-chemin, mais il faut dire qu’ils sont sans doute influencés par une demi-douzaine de panneaux qui balisent le chemin et promettent une mort certaine à quiconque tente l’escalade.

Apparemment, des gens seraient morts en tentant l’escalade, mais c’est probablement parce qu’ils couraient avec des ciseaux. Nous ne voyons en effet pas d’autres explications, car le chemin de marches, peu entretenu il est vrai, ne présente aucune difficulté, bien qu’il doive être un peu glissant par temps de pluie.

Le point d’observation offre une belle vue sur les pics mais ne présente pas non plus d’immense intérêt, notamment parce qu’il est très sale, comme si tous les survivants de l’ascension étaient montés exprès avec leurs déchets pour les déverser en haut du pic.

Enfourchant nos vélos avec un plaisir à peine diminué par notre mal de fesse, nous partons explorer la région.

Nous quittons la rivière Li pour passer un peu par les terres, puis nous atteignons le joli petit village de Fuli. Il est très peu touristique, ce qui nous étonne pour le coin : il n’y a que quelques magasins de souvenirs (et des originaux pour une fois) et un ou deux cars de touristes chinois pionniers. C’est joli, tranquille, agréable, mais pour combien de temps encore ?

Nous longeons la rive gauche dans un paysage si beau qu’il en fait mal aux yeux, alternant les pics et les cultures de riz, de maïs ou les potagers. Il y a dans cet ensemble un petit côté jardin d’Éden : les gens, chapeau conique sur la tête, cultivent à la main de petites parcelles sur lesquelles légumes et fruits paraissent pousser en abondance, tandis que poules, canards et buffles se baladent en liberté, pataugeant dans les réseaux d’irrigation.

Nous allons chercher un bateau pour traverser la rivière Li mais il n’y a aucun embarcadère en vue. A la place, nous trouvons un coin de bivouac tout à fait charmant, sous les bambous et en bord de rivière, face à un petit village sur l’autre rive. L’impression de tranquillité et de bien-être est renforcée par un monsieur qui nourrit des canards sur la rivière, en sifflotant gaiement un air chinois.

Après manger et alors que nous nous apprêtons à nous coucher, vers 20h et dans la nuit noire, une musique techno se met à pulser sur l’autre rive, causant un sacré contraste avec le chant traditionnel du pêcheur chinois entendu un peu plus tôt, mais montrant que dans ces villages, il y a aussi des jeunes !

Jour 118, vendredi 9 novembre, 48km et 175m de dénivelé : Balade entre les pics karstiques jusqu’à Yangshuo

Aujourd’hui aussi, nous partons pour une petite journée, durant laquelle on se balade le nez en l’air et l’air ravi. Ravis si ce n’est que nous n’avons pas de thé, car plus de carburant pour notre réchaud ! Et c’est bien regrettable, car Victor m’a fourbement refilé son angine. Comme nous ne pouvons pas traverser la rivière là où nous sommes, nous retournons chercher un autre embarcadère dans la petite ville de Fuli. Là, on nous propose d’abord un tour en bateau de bambou, comme le font quelques dizaines de touristes, avant de nous diriger vers un bateau qui fait la liaison entre les deux rives de la rivière Li, en l’absence de pont.

Une fois de l’autre côté de la rivière, et toujours dans des paysages magnifiques de pics et de rizières, nous cédons à l’envie d’aller découvrir le village près duquel nous campions la veille. Il est encore plus mignon de ce côté de la rivière, avec ses maisons anciennes bien préservées, et son large quai.

Une jeune femme nous accoste en anglais pour nous indiquer qu’il y a un petit temple un peu plus haut, et aussi qu’elle tient un restaurant au bord de l’eau dans le cas où nous voudrions nous restaurer ou boire quelque chose. Délaissant un peu nos vélos, nous allons donc nous promener, puis décidons de manger dans son restaurant, car il est vraiment dans l’endroit le plus magnifique de Chine que nous ayons vu. La jeune femme nous propose de manger des fleurs de courge farcies, un plat un peu cher mais magnifique, et nous découvrons qu’elle parle aussi un peu français. Elle l’a appris car le village est un des bons plans du Guide du Routard (alors que notre guide, le Lonely Planet, sans surprise, le méconnait) et voit régulièrement passer des touristes français. Ça nous fait tout bizarre de l’entendre : c’est la première chinoise francophone que nous rencontrons.

Et c’est drôlement bon les fleurs farcies, on a noté la recette!

Après cet agréable interlude culinaire, nous repartons sur nos petites routes, et contemplons les énormes buffles d’eau qui paissent dans les rizières. Ce sont de curieux animaux, subtil mélange entre la vache, dont ils ont l’apparence, et l’hippopotame, dont ils se rapprochent des mensurations. Ils ont aussi, en lieu et place d’une toison, une peau épaisse et nue qui rappelle celle des hippos, bien qu’à y regarder de près, ils ont quelques poils éparses, un peu comme les cochons. Leurs larges cornes, tirées vers l’arrière et leur écrasant les oreilles, leur donne l’air contrit d’un chien qui a fait une bêtise.

En milieu d’après-midi, nous devons malheureusement quitter notre petit paradis pour nous rapprocher de Yangshuo, afin d’y faire quelques courses, d’y trouver de l’eau et de l’essence, pour préparer la suite de notre voyage à vélo.

Mais obtenir un litre d’essence à la pompe, ça n’est pas une mince affaire. Alors que nous faisons la queue comme les scooters, on nous renvoie fermement quand vient notre tour. Nous avons beau insister, personne ne veut nous vendre de l’essence, et on nous montre les scooters, comme pour nous dire que « pas de véhicule motorisé, pas d’essence ».

Aussi surpris qu’embêtés par ses multiples et définitifs refus inexpliqués, nous tentons notre chance auprès d’une boutique qui fait dans la location de vélos et de scooters. La vendeuse n’a rien mais nous envoie de l’autre côté de la rue, chez un revendeur d’essence, qui semble bricoler des scooters. Victor y va, mais on lui refuse à nouveau l’essence, tandis que je discute par geste avec la femme de la boutique de location, qui veut savoir le prix de chaque équipement de mon vélo et me montre le sien, un joli vélo de course. Elle nous proposera même de nous acheter nos rétroviseurs, ce qu’évidemment nous refusons. Constatant que Victor revient bredouille, elle nous demande 10 yuans et va elle-même remplir notre fameux bidon auprès des revendeurs. 10 yuans pour notre petit contenant, ça fait cher le litre d’essence, mais nous en avons grandement besoin.

Nous nous éloignons ensuite de Yangshuo, une ville qui nous paraît bien trop peuplée et polluée après nos deux jours dans la magnifique campagne attenante, mais nous avons du mal à nous extraire de la zone touristique. Nous observons avec amusement des murs d’escalade chinois, où l’on motive les grimpeurs en suspendant des peluches au sommet, puis nous essayons d’acheter du miel local. Mais quand la vendeuse nous fait sentir quelques bocaux de sa production, nous leur trouvons un odeur très prononcée d’alcool. Est-ce un effet de la fermentation, ou un mélange volontairement alcoolisé, comme celui qu’on peut voir dans une autre bouteille, remplie pour moitié de frelons ? En tout cas, ça ne va pas aller pour sucrer notre thé et soigner mon angine !

Les murs d’escalade chinois, juste au dessus de la nationale

Après quelques échecs dans la recherche d’un bivouac pour le soir, dans cette zone trop peuplée, un petit symbole de tente sur le GPS titille notre curiosité. Se pourrait-il qu’il y ait une camping ici, en Chine ? Il est fort probable que ce soit un simple spot de bivouac renseigné sur le GPS, plutôt qu’un véritable camping, mais dans tout les cas, cela nous ira très bien.

Notre première tentative pour trouver un endroit où camper: un parc d’attraction abandonné et un peu flippant

Nous suivons donc des petites routes, jusqu’à passer dans un village, et tomber sur un groupe de « blancs » (c’est à dire pas des asiatiques mais des européens, des américains ou des australiens), qui semble occupés à faire de la gym. C’est vraisemblablement un groupe de grimpeurs, venu passer quelques jours à escalader courageusement les pics très verticaux autour de Yangshuo. Aussi surpris de nous voir passer sur nos gros vélos que nous de voir autant d’étrangers réunis au même endroit, personne ne pense à s’interpeller, et nous continuons à monter vers le camping indiqué sur le GPS. Et là, au détour d’un tout petit sentier de terre, nous découvrons le plus bel endroit de bivouac de toute la Chine, et peut être de tout notre voyage. L’endroit est caché de toute habitation, mais bien dégagé, au milieu d’un joli cirque de pics et près de champs de fruits de la passion. Il y a des emplacements plats et bien tondus pour poser la tente, un robinet (malheureusement fermé) et l’ensemble semble délaissé. C’est probablement un site de camping pour grimpeurs, mais il est abandonné durant les mois d’hiver : tant mieux pour nous ! Nous nous installons confortablement, et ravis de pouvoir admirer le soleil se coucher derrière les pics, dans un coin bien tranquille.

Seul petit sujet d’insatisfaction : notre litre d’essence, payé au prix fort chez le revendeur n’est pas, comme nous le pensions, du sans plomb 95, et ne se transforme donc pas correctement en gaz dans notre réchaud. Nous devrons donc encore manger froid, et nous passer de thé !

Allez, reposons-nous bien, car à partir de demain, c’en est fini des mignonnes petites balades à vélo dans des coins touristiques, nous avons un peu plus de 400 km à faire à travers la campagne chinoise pour rallier Nanning, dernière grande ville avant le Vietnam.

2 réflexions au sujet de « Jours 113 à 118 : Retour en selle dans le Guangxi, balade entre les pics de la rivière Li »

  1. Un petit coucou de Nicole et Marc croisés sur l’Ile de CAt BA dans la baie dˋHalong, très admiratifs de votre périple !!!
    Nous partons vers Ninh Binh ce matin et espérons aussi y faire qqs kms à vélo ….
    alors au plaisir de vous y retrouver et bonne suite

    Répondre

  2. hé mais les kakis et les beignets de fleur de courgette on connaît bien ça dans la région de Nice! c’est la magie du sud 😉
    Par contre il n’y a pas d’aussi beaux pains de sucre!

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