Jours 69 à 75: En tour en Mongolie dans le désert de Gobi

Cette semaine, nous partons en « tour » c’est-à-dire en voyage organisé, avec un van, un chauffeur et un guide, dans le désert de Gobi. C’est un peu moins audacieux que le voyage à vélo, mais cela va nous permettre de voir les principaux points d’intérêts du désert, en parcourant de longues distances et en voyageant confortablement… Ou presque confortablement.

L’équipage

Pour cette petite épopée dans le désert, nous sommes 9 en tout. Côté locaux, il y a notre guide, Tsitskey, la cinquantaine et beaucoup d’énergie et Amba (ou à priori Gamba comme on s’en aperçoit comme des idiots le dernier jour) notre sympathique mais un peu timide chauffeur qui ne parle pas anglais.

Tsitskey et Amba font une offrande sur un « ovo », une sorte de grand cairn bouddhiste

Côté touristes, il n’y a que des voyageurs au long court, et une majorité de français. Il y a ainsi Delphine et Max qui nous viennent du Sud-Ouest : ils sont partis de la Russie pour un tour du monde de deux ans et se dirigeront ensuite vers le Népal. Ils font durant leur voyage de la sensibilisation sur la maladie de Charcot avec l’Association ARSLA (ils ont un blog ici pour en savoir plus).

Delphine et Max en pleine session pour le challenge de l’Arsla

Il y a aussi Sonia, une française expatriée depuis plus de quinze ans aux Etats-Unis et qui est aussi passée par le Transsibérien, puis qui se dirigera vers la Chine, Stéphanie, une hollandaise, qui a quitté son poste d’enseignante en maternelle pour un voyage de plusieurs mois et qui se rend bientôt en Chine puis au Japon, et enfin Nick, un américain du Nouveau Mexique. Ce dernier vient de passer un mois dans le parc national de Gorki Terelj, à randonner en autonomie avec deux chevaux qu’il avait achetés, puis prévoit de se trouver une nouvelle monture, mais métallique cette fois, pour parcourir le Vietnam en moto.

Stephanie, Tsitskey, Sonia et Cécile
Tsitskey et Nick

Enfin, il y a notre monture, un gros van russe de couleur verte et qui peut transporter 9 personnes tout pile. C’est dans ce genre de van, le plus souvent gris, que s’effectuent la plupart des tours en Mongolie. Ce sont des machines ultra solides, qui semblent aussi bien rouler sur le bitume que sur la terre battue, mais qui secouent leurs passagers comme des pruniers.

Notre bolide en question, quelque part dans le désert

Amba manie son van avec une dextérité confondante, sur la neige, que nous traversons en sortant d’Oulan Bator, sur la terre comme dans le sable! On aurait presque envie d’en ramener un par la route jusqu’en Europe (un van, pas un Amba), mais il consomme quand même beaucoup et ne semble pas adapté à la réglementation française.

Le périple

Premier jour, vendredi 21 septembre: départ de Youbi en direction des montagnes

Nous quittons Oulan Bator vers 10h vendredi matin pour nous diriger vers l’immense désert situé au Sud de la ville, vers la frontière chinoise. Nous devons d’abord prendre patience dans les énormes embouteillages que génère régulièrement la circulation routière de Oulan bator aussi appelée Youbi (UB en anglais, la langue des voyageurs la plus parlée). Enfin extraits des bouchons, nous observons avec un peu d’inquiétude – car nous sommes supposés camper ce soir – les collines gelées et blanchâtres qui surplombent la capitale. Alors que la route est barrée, le van nous étonne pour la première fois en passant par des petites pistes gelées sans perdre sa vive allure, sans glisser et sans se poser de questions ! A l’arrière, on s’accroche comme on peut en se cognant les uns les autres, mais c’est le début, alors on en rigole encore.

Notre premier arrêt repas nous permet de faire meilleure connaissance avec ce qui va être notre quotidien en dehors de la capitale : dans les surprises, il y a le milk tea, qui n’est pas tout à fait un thé au lait comme son nom l’indique, mais plutôt un lait à l’eau avec un tout petit peu de thé. Il peut être fait avec du lait de chèvre ou de mouton si l’on n’a pas de chance (enfin, à notre avis), de vache ou de yak (et qui sait peut-être de chameau dans certaines contrées), il est neutre mais a une dominante salée, et on peut aussi y ajouter parfois du beurre. Il est bu aux repas et il est aussi servi dans les yourtes aux voyageurs ou aux voisins de passage. La deuxième surprise ce sont les toilettes, et pourtant, en ayant déjà pas mal voyagé, nous pensions être prêts. Ce sont de petites cabanes de tôles un peu branlantes, parfois hautes seulement jusqu’aux épaules ou dotées de trois murs sur quatre (au moins on a tout le loisir d’observer le paysage). On repose sur un plancher de bois dans lequel il y a un trou ou une planche manquante, et vraiment, VRAIMENT, on espère que l’ensemble tiendra le temps de notre passage quand on voit ce qu’il y a en dessous !

Nous continuons notre route et faisons un premier arrêt dans de sympathiques pierriers battus par de forts vents, et qui abritent des choses intéressantes comme les ruines d’un temple ou une grotte, puis on campe un peu plus loin.

Vu la température extérieure et le vent qui souffle, il faut du courage pour oser sortir le bout du nez et aller planter les tentes. Il y a ensuite une grande motivation collective pour aller chercher du bois avant la nuit afin d’avoir un bon feu de camp. Mais petit détail qui a son importance : dans le désert de Gobi, il n’y a pas, ou très peu, d’arbres. A force de persévérance, notre petit groupe finit quand même par réussir à glaner assez de petit bois – et quelques bouses séchées – qui devraient permettre au feu de durer un peu à condition d’être constamment alimenté.

Pendant que l’on boit quelques bières (les bien nommées Golden Gobi) et un peu de vodka, c’est notre guide Tsistkey, qui prépare la pitance, une bonne soupe aux patates, nouilles et mouton.

La nuit est particulièrement fraîche, malgré le prêt de tapis de sols isolants, et avec Victor, nous avons à peine chaud en cumulant nos duvets et ceux prêtés par l’organisation du tour. Nous plaignons ceux qui n’ont que les duvets prêtés, et particulièrement Sonia et Stéphanie, qui ne ferment pas l’œil de la nuit.

Deuxième jour de tour, samedi 22 septembre: vers les white cliff

Le lendemain, il fait un peu meilleur et nous prenons le chemin des white cliff, un ensemble sablonneux très joli et un peu plus coloré que son nom ne l’indique.

Sur le chemin, nous nous arrêtons près d’une yourte près de laquelle se repose tranquillement un gros troupeau de moutons et de chèvres. C’est un paysage qui deviendra habituel: souvent les nomades du coin ont un gros troupeau constitué pour moitié de moutons et de chèvres qui semblent cohabiter pacifiquement.

ça par contre, ce n’est pas le format habituel des chiens de Mongolie!

Goat photobomb!

La pause de midi nous voit d’abord nous arrêter dans une petite ville, celle de notre chauffeur, pour pas mal de temps. Comme nous l’explique sans détour Tsitskey, Amba a besoin d’une heure de tranquillité avec sa femme… Nous nous écartons donc discrètement de la yourte pour aller nous balader.

Une petite ville de province

Les affaires maritales terminées, nous voici partis pour ces fameuses falaises multicolores:

Le soir, nous ne campons pas mais nous allons dans une yourte de nomade que Tsitskey connaît.

Sur la route, nous voyons des chameaux, qui se baladent dans le coin, genre normal, comme ça…

Quand nous arrivons, nous sommes accueillis par un énorme chien qui paraît bien peu avenant, et nous incite tous, guide y compris, à rester patiemment dans la voiture en attendant les propriétaires des lieux. C’est une petite mamie qui arrive bien vite et qui maîtrise le molosse qui s’étale à ses pieds. Tsitskey nous précise que « attachez les chiens » ou « nokhe khor » (prononcer noreu ror), est une autre façon de dire bonjour aux nomades quand on leur rend visite. En effet, tout le monde a un ou plusieurs chiens qui font office de gardiens de troupeaux et d’alarmes de maison. Et ça fonctionne TRES bien, nous sortons enfin du véhicule tout en restant à bonne distance du chien, même attaché. Nous découvrons notre première yourte de l’intérieur et nous avons droit au traditionnel thé au lait.

On peut décrire rapidement l’intérieur d’une yourte sur la base de celle-ci et de celles que nous verrons par la suite. Tout d’abord, le terme yourte vient du russe, en mongol on dit « ger » (prononcer Guèr) et voici comment elles sont le plus souvent aménagées. Commençons par la périphérie : de part et d’autre de la porte de la yourte, il y a le plus souvent les ustensiles de cuisine (pendus aux murs ou posés sur de petits meubles) et parfois aussi de la viande, du lait et du fromage qui sèchent ou fermentent. Plus loin, à gauche et à droite, traditionnellement un côté femme et un côté homme, il y a deux lits, dont les matelas sont souvent en bois recouverts d’une fine couverture. On s’assoit dessus dans la journée, ou alors par terre ou sur de petits tabourets. Au fond de la yourte, il y a souvent un meuble sur lequel sont posés des photos et des symboles religieux. Dans d’autres yourtes, il peut y avoir aussi une télévision alimentée par une ou plusieurs batteries.

Mais le plus important est ce qui se situe au centre de la ger : en face de l’entrée, il y a un poêle, alimenté au charbon, bois ou excréments séchés, qui chauffe et qui permet de faire la cuisine. Puis, derrière il y a les deux piliers qui soutiennent la ger, et derrière encore, une petite table basse. C’est là qu’on pose le thermos de thé au lait et un saladier, toujours remplis de gâteaux, bonbons ou morceaux de yaourts séchés, qu’on offre aux voyageurs de passage.

Vivre ou passer dans une ger s’accompagne d’un certain nombre de règles et d’interdits, qu’il faut absolument respecter. Parmi ceux-ci on peut citer l’obligation de saisir tout ce qui nous est tendu de la main droite (si c’est lourd la main gauche peut venir en renfort de la main droite mais pas toucher l’objet tendu). En tant que gauchers, Max et moi devons vraiment lutter contre nos réflexes, à moins d’être rappelés à l’ordre par Tsitskey. Il est aussi formellement interdit de passer entre les deux piliers porteurs de la ger, ou de se passer quelque chose entre ces piliers ; cela serait de mauvaise augure pour le mariage des propriétaires de la yourte. Cette interdiction semble tomber sous le sens, puisque juste à côté des piliers, il y a un poêle brulant. Il y a d’autres obligations qui nous semblent tout aussi logiques, comme dormir les pieds vers la porte (pour voir venir les intrus) mais aussi des interdits un peu plus surprenants, comme celui de siffler, ou encore de toucher les chapeaux ou la tête des gens.

Nous nous installons donc dans la ger pour notre nuit (à trois sur les deux lits et quatre au sol, tous pieds vers la porte ce qui limite les configurations possibles), alors que les propriétaires la délaissent et vont dormir dans un camion aménagé à côté, avec notre chauffeur et notre guide. La petite mémé, qui apparemment n’entend ni n’écoute pas grand-chose, veille à ce que nous ayons bien chaud en blindant littéralement le poêle de charbon. Très vite la ger se transforme en véritable sauna et nous étouffons, chacun sortant de son duvet et enlevant progressivement des couches de vêtements. Ah les fameuses amplitudes thermiques de la Mongolie !

Troisième jour de tour: canyon et rats sauvages

Nous nous réveillons alors que notre hôte nomade, la petite mémé précédemment présentée, est déjà aux fourneaux pour nous préparer du thé au lait. On peut désormais étudier les doses : deux sachets de thé pour quelques litres de liquide, pas étonnant qu’on sente peu la théine. Au petit déjeuner, nous avons droit à nos menus de touristes européens, du pain et des tartines (nous le découvrirons plus tard avec Victor, les nomades mangent plutôt des pâtes aux patates et mouton même de bon matin) mais aussi du yaourt de chèvre ou de mouton (ou des deux ?) maison. C’est assez acide et ça sent la biquette, mais avec de la confiture, c’est plutôt très bon !

Après un nouvel arrêt du midi dans une petite ville de province pour le ravitaillement, nous prenons la route d’un canyon plutôt sympa – mais sans immense intérêt – où nous faisons une petite randonnée.

L’endroit est colonisé par de rigolotes petites bêtes, les wild rats en anglais, mais qui nous inspirent plutôt un savant mélange de cochon d’inde pour les oreilles, de lapin pour la forme, et de marmotte pour les sifflements qui sont poussés, avec aussi une touche de hamster pour le poil… Bref, une bête presque aussi compliquée que l’ornithorynque mais mignonne à observer.

Nous semons la guide sans vraiment le faire exprès, ce qui allonge la randonnée mais nous oblige à rentrer de nuit. Heureusement, la lune est presque pleine et nous éclaire bien ! Le soir nous dormons à nouveau dans des yourtes, mais des yourtes de tourisme qui ne sont pas habitées par les nomades.

Quatrième jour de tour, le 25 septembre: musée des horreurs, chameaux et dunes de sable

Le lendemain, seuls quelques courageux se lèvent pour aller au musée à 7h30 du matin, Max et Delphine toujours sur le pied de guerre à 6h30 pour ne pas manquer les levers de soleil, mais aussi Stephanie et moi (Cécile). Nous découvrons alors un des musées les plus surprenants, voire les plus moches, osons le dire, jamais vus auparavant. Véritable cauchemar de la SPA, de la Fondation Brigitte Bardeau et de tous ceux qui aiment un temps soit peu la nature, il y a de la fourrure d’animal rare partout sur les murs, curieusement cousue sur des tissus en soie rouge. La plupart de l’exposition est constituée par des animaux empaillés de toutes tailles, du chameau sauvage à la gerbille, ce qui en soit serait seulement triste si en plus les naturalisations n’étaient pas toutes mochissimes et grotesques. La vue d’un loup au museau tout écrasé ou d’une panthère des neiges à la tête minuscule en devient hilarante et nous tire quelques larmes de rire. Le photographe de notre équipe de la « goguette à bicyclette » étant cependant, et avec raison, endormi au chaud dans une ger, je n’ai malheureusement pas de photographies à montrer pour illustrer mon propos et vous faire rire un peu.

Bref, à part ces tristes et hideuses peluches, nous voyons quelques œufs de dinosaures fossilisés, et nous n’apprenons rien, à part qu’à notre grande surprise, il y aurait des mouettes et des canards dans le désert de Gobi ! A moins que ces volatiles empaillés ne soient là que pour faire joli, ce qui serait complètement raté…

Après le petit déjeuner, nous reprenons la route pour endurer des heures de tape-cul jusqu’à notre prochaine destination : les dunes de Khongor. Le voyage est long, surtout qu’on ne peut pas dormir tellement ça secoue, à moins de ne se coller violemment contre le voisin ou contre la vitre. Personnellement j’ai la technique : je mets mon gros bonnet, ça absorbe bien les chocs !

Le paysage que nous découvrons progressivement vaut bien tous les désagréments du voyage en van soviétique!

Le désert de Gobi est un désert plutôt herbeux que sablonneux, avec seulement quelques 2% de sable, mais il est doté d’une très longue et grande chaine de dunes qui s’adosse sur une chaine de montagnes. Son point culminant, une dune dite « singing dune » ou dune chantante, est une véritable attraction touristique. Le but : grimper tout en haut pour entendre la fameuse dune chanter et se croire dans le sahara !

Mais avant, nous allons faire de la bête à deux bosses ! Comme partout dans le Gobi, il y a des chameaux, qui sont élevés en semi libertés pour leur laine et leur lait, mais qui servent aussi de moyens de déplacement. En bons touristes que nous sommes, nous passons donc par la regrettable étape « promenade de couillons » à dos de chameau.

Les voilà qui arrivent, oui, tout seuls comme des grands
Nous découvrons qu’un chameau, c’est vraiment moche
Malgré ce petit air un peu prétentieux qu’ils se donnent
Et en plus ça pue comme c’est pas permis

Ça n’est pas l’expérience que nous préférons, car d’une part le chameau est aussi inconfortable que la balade est inintéressante, et aussi parce que ces pauvres animaux, au demeurant peu sympathiques et pestilentiels, sont menés à l’aide d’un bâton qu’on leur enfonce dans le nez et sur lequel les chameliers tirent pour les faire obéir.

Il y a que le mien, Camelito, un chameau blond, qui tient à peu près la route niveau style
La vue depuis un chameau quand on fait une balade
Ne me mords pas avec tes dents pourries, Camelito!

Après ce moment, peut-être le plus décevant du tour, nous avons droit au moment le plus chouette, l’ascension de la plus haute dune de sable et son coucher de soleil. C’est aussi un des moments les plus éprouvants du tour, car la montée est très raide et assez décourageante : enfoncés jusqu’aux chevilles dans le sable, on a l’impression de redescendre de vingt centimètres à chaque fois que l’on fait un pas !

Allez, c’est parti pour l’ascension, un vrai régal pour les genoux tendiniteux

Tout le monde galère, sauf Victor, qui prétend à qui veut l’entendre qu’il a trouvé une technique infaillible pour progresser rapidement. C’est celle de « l’alpiniste », qui consiste à planter ses orteils horizontalement dans le sable, comme s’il s’agissait de crampons, tout en se tenant bien droit. Chacun sa technique, et de nombreux autres choisissent celle du « petit chien », un peu moins classe puisqu’il faut grimper à quatre pattes mais qui semble faire ses preuves chez les coréens.

Bon là c’est pas une coréenne, c’est Sonia, mais c’est pour l’illustration…

Ces derniers, les coréens, sont très nombreux sur la dune et sur toutes les autres attractions touristiques du coin car c’est leur semaine de vacances, et ils nous font bien rigoler car ils sont tout le temps en train de crier et de prendre des selfies.

Certains montent plus vite que d’autres, et chargés en plus!
La descente est plus rapide et amusante que la montée, surtout pour ceux qui ont pensé à s’équiper de luges!
On arrive en haut épuisés et assoiffés
Mais la vue n’est pas trop mal

Nous entendons alors la dune chanter. Surprise, il s’agit d’une sorte de grondement plus ou moins ténu qui ressemblerait au son des pales d’un hélicoptère. Un guide mongol assis à côté de nous nous explique que ce son étrange est causé par le déplacement du sable chaud en fin de journée…

Seuls les coréens ont encore assez d’énergie pour crier et sauter partout
Nous, on choisit plutôt de regarder le coucher de soleil en méditant sur la place de l’homme dans l’univers

Derrière nous, il y a un spectacle encore plus chouette : la montée d’une magnifique et gigantesque lune au-dessus des montagnes.

 

Cinquième jour de tour: allons donc voir les falaises flamboyantes!

Le lendemain matin, nous profitons avec Victor de la passion infatigable des levers de soleils de Max et Delphine pour leur emboîter le pas et monter à nouveau sur les dunes qui jouxtent notre campement. Nous découvrons pour la première fois une rivière dans le désert de Gobi, et des dunes « décoréanisées » et donc un peu plus tranquilles.

Nous déménageons ensuite pour nous rapprocher d’une autre curiosité du désert, Bayanzagad, les « flaming cliffs » ou falaises flamboyantes, qui doivent leur nom à la couleur qu’elles prennent quand elles sont éclairées par le soleil, et notamment par la lumière rasante de l’aube ou du crépuscule. Manque de chance pour nous cependant, après des jours de beau temps ensoleillé, le ciel est couvert et les falaises flamboyantes sont justes de grosses falaises qu’on croirait taillées dans de la terre glaise. Elles ne sont pas particulièrement impressionnantes, même si la balade dans les gros boyaux glaiseux pour en sortir devient assez rigolote.

Un tout petit bout de flaming cliff

Nous campons dans des ger de tourisme qui paraissent bien isolées dans la longue steppe plate où nous nous trouvons.

Les toilettes au milieu de nulle part, qui nous permettent un petit moment de méditation

Côté flaming cliffs, nous ne nous décourageons pas : certes nous n’avons pas pu voir le coucher de soleil sur les falaises, mais nous verrons demain un beau lever de soleil !

Sixième jour de tour, le mercredi 26 septembre: Fête du petit roi et montagnes sacrées

Le lendemain matin, malgré la motivation collective pour se lever avant le soleil, nous n’avons pas plus droit que la veille au spectacle des falaises flamboyantes. Le soleil est malheureusement à nouveau caché par d’épais nuages. Nous prenons la route du retour vers Oulan Bator et notre dernière nuit dans les montagnes sacrées de Khogno Khan.

Nous nous arrêtons sur le chemin chez un des chauffeurs de Golden Gobi, qui est aussi éleveur de chevaux. Son fils vient d’avoir trois ans, étape symbolique de la vie à l’occasion de laquelle les petits garçons sont rasés, reçoivent un chapeau traditionnel et des billets en petites coupures. Cette cérémonie se déroule à l’automne alors que pour les petites filles elle a lieu au printemps l’année de leur deuxième anniversaire.

Pour s’habituer au froid, les petits enfants sont laissés tout nus lors des mois d’été, ça leur fait les pieds
Le petit garçon, centre de toutes les attentions, est bien mignon!

Ces éleveurs de chevaux sont nomades : ils se déplaceront lors de l’hiver pour se rapprocher d’une ville. Ceci permettra aux enfants d’aller plus aisément à l’école, qui commence à l’âge de leurs six ans. Le taux d’alphabétisation en Mongolie est élevé : il est de 98%, c’est-à-dire que tout le monde sait lire et écrire ce compliqué alphabet cyrillique. Ce sont les femmes qui sont les plus éduquées, puisque les garçons doivent s’occuper des travaux d’élevage. Elles sont majoritaires à l’université et occupent 70% des emplois qualifiés. Par exemple, comme nous l’avons vite remarqué, la plupart des guides mongols sont des femmes, alors que les chauffeurs sont des hommes.

Nous profitons de cette halte chez le petit enfant roi pour découvrir la traite des juments, qui a lieu quatre fois par jour toutes les deux heures, pour environ deux litres quotidiens de lait.

la technique est un peu fourbe: on approche les poulains pour téter trois secondes et faire venir le lait, puis on va les attacher plus loin

Ce lait sert exclusivement à la fabrication de l’airag, le lait fermenté, une boisson alcoolisée très populaire chez les mongols. Nous en profitons également – quoique profiter ne soit pas vraiment le mot – pour tester cette fameuse boisson … Est-ce bon ? Pour répondre à cette question, des photos valent mieux qu’un long discours, mais en quelques mots ça sent le fromage, c’est tout à la fois froid, acide et piquant, et heureusement que nous n’avons que deux bols pour sept ! Petits joueurs que nous sommes nous les étrangers : Amba notre chauffeur boit son premier bol cul sec, puis en sirote un second en rongeant des os de mouton bouilli.

Le soir, nous arrivons dans les environs de la montagne sacrée, mais il est déjà bien tard et il n’est plus question d’aller y grimper. A la place, nous montons à nouveau les tentes et nous nous égaillons dans toutes directions pour aller chercher du bois. L’exercice est bien plus facile que lors de notre premier bivouac car, enfin, les arbres sont de retour dans le paysage.  Bientôt nous avons donc un grand feu de bois pour notre dernière soirée ensemble, mais la pluie met cependant fin à la soirée un peu plus tôt que prévu. La nuit, cette fameuse dernière nuit en tente sera bien agitée pour tout le monde…

Dernier jour de tour et 75ème jour de voyage: montagne sacrée, loups et retour à Youbi

Pour nous d’abord avec Victor parce quelque chose s’agite et se tortille dans nos estomacs ; nous ne savons pas trop qui ou quoi accuser, entre le lait fermenté de jument ou les glaces achetées dans un village et à la chaîne du froid probablement moult fois rompue ! Toujours est-il que vers 2h du matin, nous nous relayons pour sauter hors de nos duvets et de notre tente, enfiler des chaussures à la va vite et courir le plus loin possible des tentes pour vider nos estomacs. Malgré l’inconfort de la position dans laquelle la tourista nous met, nous en profitons pour admirer le magnifique paysage nocturne qui s’offre à nous, et je le dis, je l’affirme, malgré les moqueries des autres, je suis sûre de sentir la chaleur du rayon de lune lorsqu’elle se dégage enfin des nuages ! Mais se trouver dans les montagnes à cette heure si tardive a aussi quelque chose d’un peu intimidant : et si des bêtes sauvages profitaient de notre état de vulnérabilité pour nous attaquer ? Après tout comme le dit Victor, c’est toujours l’élément faible et malade du troupeau que les prédateurs ciblent en premier.

Des bruits durant la seconde partie de la nuit peuvent confirmer que ces craintes ne sont pas entièrement injustifiées. Nous entendons tous des froissements de feuilles et des reniflements de naseaux (nous apprendrons le matin qu’il s’agissait probablement de quelques biches) tout près des tentes, puis, tout à coup, le hurlement, très proche, d’un loup ! Pour ma part, je suis toute en joie d’entendre un loup car il témoigne de la présence de la nature tout autour de nous, ce qui nous manque un peu en France, mais certains de nos compagnons sont un peu inquiets, comme Sonia, qui hésite à se saisir de son couteau suisse.

Et cette nature exubérante n’a pas fini de nous tenir éveillés cette nuit-là, puisqu’un vent tonitruant, accompagné de pluie, se lève ensuite et s’acharne à mettre les arceaux et l’imperméabilité de nos tentes à rude épreuve.

Quelle nuit ! Mais au petit matin, nous avons la joie de constater que personne n’a été ni dévoré par un loup, ni écrasé par la chute d’un arbre, ni ne s’est envolé avec la tente. Pour fêter ça, nous petit-déjeunons tous dans le van les uns collés aux autres, puis Max et Delphine d’un côté, Victor et moi de l’autre, nous allons escalader un peu ces montagnes ! Le panorama qui se dévoile à nos yeux au sommet est magnifique, mais il y fait un vent terrible qui nous projette avec force contre les rochers. C’est impressionnant, nous devons nous tenir l’un à l’autre pour ne pas chuter ! Ah décidément, le désert de Gobi n’a pas fini de nous surprendre.

Mais le tour est déjà fini, nous rentrons dans nos pénates à Youbi ! Une fois arrivés à l’hostel Golden Gobi, tout le monde se précipite aux douches et au pressing avec l’espoir d’effacer une semaine de poussière, d’odeur de mouton et de chameau, puis nous craquons tous pour un plaisir d’européens, des pizzas et une salade de crudités ! Et des bonnes bières, pardi !

4 réflexions au sujet de « Jours 69 à 75: En tour en Mongolie dans le désert de Gobi »

  1. La description des commodités devrait rappeler à la maman de Cécile quelques épisodes de camping en bretagne… . Merci pour cette description haute en évènement et en odeurs (c’est souvent l’information oubliée dans les description de voyage, au risque de faire fuir le voyageur !)
    Petite remarque, les latins n’ont rien inventé en nommant la main gauche « sinister »
    Je m’interroge : n’aurait-on pas tendance à s’embougeoiser avec les yourtes pour touristes ?
    Debillement vôtre

    Répondre

  2. Magnifique cet article, hyper bien écrit et très belles photos! Vous nous avez fait mourir de rire!! Mention spéciale la promenade de couillon à dos de chameau!!!!

    Répondre

  3. Rien qu’à vous lire écrire de mouton, chèvre, lait fermenté et autre yaourt séché ça me file la nausée..
    Mais c’est vrai que ça à l’air choli quand même!
    Bisous

    Répondre

  4. Les amis,

    C’est un régal de vous lire !
    La plume est belle, bravo Cécile !

    Continuez à nous narrer vous aventures, on adore !

    bisous

    Juliette from LE CHÂTEAU.

    Répondre

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